Maryse Goudreau, première lauréate du prix Lynne-Cohen

Nouvelles par MNBAQ
6 décembre 2017

La Succession Lynne Cohen, en collaboration avec le Musée national des beaux-arts du Québec et sa Fondation, est fière de couronner Maryse Goudreau du titre de première récipiendaire du prix Lynne-Cohen.

Destiné aux artistes québécois, ce nouveau prix bisannuel, sous la direction d'Annie Gauthier, directrice des collections et de la recherche au MNBAQ,  vise à soutenir la pratique d’artistes professionnels de la relève en arts visuels, dont la photographie fait partie inhérente de leur démarche. La lauréate de 2017 recevra une bourse de 10 000 $ sans condition. Et pour mettre en lumière son travail, la production d’une capsule vidéo, créée par le MNBAQ, fera l’objet d’une diffusion sur le site Internet du Musée ainsi que sur les réseaux sociaux.

« Au cours de sa longue carrière dans les arts, Lynne Cohen a reçu bon nombre de prix et de subventions. À la fin de sa vie, elle a manifesté le désir de donner en retour : elle était convaincue qu’elle n’aurait pas pu accomplir tout ce qu’elle a réalisé si elle n’avait pas reçu autant de soutien. Elle souhaitait donc aider, de quelque manière que ce soit, les autres artistes à poursuivre leur travail. Elle a également insisté pour que le prix que je finance n’exige pas toutes sortes de conditions et le MNBAQ a accédé avec plaisir à cette requête. Nous avons donc créé un prix destiné aux artistes dont les œuvres intègrent une dimension photographique. Bien sûr, Lynne Cohen ne pouvait savoir qui recevrait le prix, mais je suis certain qu’elle aurait été aussi contente que moi de la décision du jury de remettre le prix à Maryse Goudreau. Lynne Cohen a soutenu des artistes qui réalisaient des œuvres qu’elle estimait « sérieuses » – ce qui est très élogieux de sa part – et elle aurait considéré le travail de Maryse Goudreau comme étant sérieux, voire bien plus que cela. » de dire Andrew Lugg, de la Succession Lynne Cohen.

Le jury du premier prix Lynne-Cohen

L’étude des candidatures s’est faite sur la base de propositions soumises par un jury réuni par Eve-Lyne Beaudry, conservatrice de l’art contemporain au MNBAQ, et composé de: Audrey Genois, directrice générale de Momenta. Biennale de l’image, Mona Hakim, historienne de l’art, critique et commissaire, spécialisée dans les enjeux liés à la photographie, Daniel Fiset, historien de l’art et commissaire indépendant, spécialiste de la photographie d’art actuel et des pratiques numériques, Martin Boisseau, artiste visuel multidisciplinaire et professeur au Cégep de Sainte-Foy ainsi qu’Eve-Lyne Beaudry. Chaque membre du jury a proposé le nom d’un artiste de la relève cumulant un maximum de dix ans de carrière. C’est donc à partir d’une liste constituée de quatre artistes que Maryse Goudreau fût ainsi nommée première lauréate, à l’unanimité.

Les jurés ont louangé l’engagement et la portée critique de la démarche de Goudreau qui s’avère pertinente et inspirante, non seulement en regard des enjeux de la photographie comme document, mais aussi comme moyen de mieux réinterpréter le monde, de fournir des ancrages dans une époque en perte de mémoire et de repères.

Maryse Goudreau

L’histoire, la mémoire, l’identité et l’engagement social sont au cœur des préoccupations de cette jeune artiste multidisciplinaire d’origine gaspésienne qui a terminé une maîtrise en Studio Arts de l’Université Concordia en 2016. Depuis 2009, son approche (post) documentaire a recours aux procédés de la photographie, de l’archive, de la vidéo, de l’installation ainsi que de l’art performatif et participatif.

Parmi ses projets significatifs, Manifestation pour la mémoire des quais (2010-2012) convie les populations maritimes à un rassemblement sur le quai de leur village (comme à New Richmond) afin de fixer les traces d’une communauté marquée par l’abandon de sites identitaires. Dans d’autres séries d’œuvres, des cartes postales de paysages gaspésiens du siècle dernier (des ferrotypes tirés de sa propre collection, achetés au hasard de ses voyages) sont apposées sous forme de masques sur des portraits de femmes anonymes, des femmes sans âge, des femmes phares qui portent la mer en mémoire et qui témoignent à la fois de la fragilité et de la force humaine. Son plus récent projet Études du béluga, Beluga studies explore un autre des aspects oubliés de l’histoire maritime du Québec. L’œuvre retrace l’histoire de la tentative d’éradication des bélugas par le gouvernement du Québec dans les années 1920.

Maryse Goudreau s’inscrit parmi une jeune génération d’artistes dont les préoccupations portent sur l’appartenance à notre environnement, sur nos amnésies ainsi que sur l’exploitation et la réhabilitation. Ces artistes se posent en témoin d’un monde marqué par le temps, par les éléments naturels ou sociologiques, par des enjeux identitaires locaux, à la fois collectifs et universels.

Lynne Cohen, l’artiste au parcours aussi inspirant qu’impressionnant

Lynne Cohen est sans conteste l’une des photographes contemporaines les plus respectées sur la scène canadienne, et dont la renommée s’étend sur les scènes américaine comme européenne. Cohen est née en 1944, à Racine, au Wisconsin. Après une année de scolarité à la prestigieuse Slade School of Fine Art de l’University College London, elle complète, en 1967, un baccalauréat en sciences de l’University of Wisconsin et obtient, en 1969, une maîtrise en arts visuels à l’Eastern Michigan University. En 1973, elle s’établit au Canada, pays qu’elle habite jusqu’à son décès en 2014. Elle vit et travaille d’abord à Ottawa pour une période de trente ans, engagée comme professeure à l’Université d’Ottawa, tout en menant une pratique artistique assidue. Elle déménage à Montréal en 2003.

Tout au long de sa foisonnante carrière, Lynne Cohen se consacre à la photographie d’espaces intérieurs, qu’elle capte tels qu’ils se présentent, sans intervention ni mise en scène. La singularité de son travail réside dans le choix de ces espaces généralement dépourvus de présence humaine et habituellement soustraits aux regards. Salles de classe, laboratoires scientifiques, établissements thermaux, installations militaires, sont tous des environnements complexes et difficiles d’accès ainsi rendus visibles pour prendre la mesure de leur étrangeté grâce à elle.

Lynne Cohen a participé à une grande quantité d’expositions individuelles et collectives à travers le monde. D’importantes rétrospectives ont d’ailleurs analysé son parcours artistique de manière pointue, notons celle organisée par le Musée des beaux-arts du Canada en 2001, ayant circulé au pays et en France, ainsi que celle récemment produite par la Fundación MAPFRE à Madrid, en 2014, aussi présentée à la Sala Vimcorsa, à Córdoba, et à la Sala Rekalde, à Bilbao.

Son œuvre fait partie de près de 50 collections publiques, dont celles du Musée des beaux-arts du Canada, de la Australian Art Gallery, de la Bibliothèque nationale de France, du Art Institute of Chicago, du Metropolitan Museum à New York, de l’Art Gallery of Ontario et du Musée national des beaux-arts du Québec

Plusieurs distinctions lui ont été décernées au cours de sa prolifique carrière, dont le prix du Gouverneur général du Canada, la plus haute distinction accordée pour l’excellence en arts visuels et en arts médiatiques, et le premier Scotiabank Photography Award, soulignant l’apport exceptionnel de l’artiste tant pour l’avancement que le rayonnement de sa discipline.

Voyez l'ensemble des œuvres de Lynne Cohen dans notre collection.

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