Don de huit œuvres exceptionnelles de Paul-Émile Borduas au MNBAQ
Le Musée national des beaux-arts du Québec a tissé des liens privilégiés avec le grand mécène et collectionneur de la Colombie-Britannique, Michael J. Audain ces derniers mois. Après avoir donné 39 œuvres de l’artiste Jean Paul Riopelle ainsi que 10 M$ pour la construction de l’espace Riopelle qui sera inauguré en 2025, M. Audain et sa femme, Yoshiko Karasawa, donnent huit tableaux remarquables de Paul-Émile Borduas au MNBAQ. Le Musée accueille ces oeuvres remarquables avec fierté.
D’une valeur de près de 9 M$, les huit tableaux de Borduas, essentiellement des années 1950, représentent non seulement l’une des plus importantes donations au MNBAQ, mais la valeur artistique de ces œuvres est inestimable.
La générosité de M. Audain et de Mme Karasawa est exemplaire, empreinte d'une passion et d'un respect sans précédent
pour l'oeuvre de l'artiste. Leur don permet non seulement de rapatrier au Québec les œuvres iconiques d’un artiste indissociable de l’histoire de l’art québécois, mais il contribue aussi à raviver la mémoire collective d'une époque déterminante
pour notre province. Ces collectionneurs d'exception méritent de recevoir notre reconnaissance pleine et entière
ainsi que notre profonde gratitude.
- Jean-Luc Murray, directeur général du MNBAQ.
Pour sa part, M. Michael Audain a émis le souhait que le Québec puisse célébrer la mémoire et la contribution de Borduas au patrimoine culturel québécois et canadien.
Mon épouse et moi apprécions depuis longtemps les œuvres tardives de Borduas, que nous considérons comme un grand maître et un visionnaire. Par cette donation, Yoshi et moi voulons souligner l’audace, le courage et la quête de la liberté artistique absolue de cet artiste. Ses peintures étaient à la fois novatrices et captivantes. Mais au-delà de son style, nous croyons
que par son enseignement à l’École du meuble de Montréal, Borduas a incité toute une génération de jeunes hommes
et de jeunes femmes à s’affranchir de pratiques artistiques stériles pour embrasser le droit à la liberté culturelle. Bien que les œuvres nous manqueront, nous sommes enchantés de retourner une part importante du travail de Borduas à son Québec natal.
- Michael Audain, président de la Fondation Audain, de la Fondation Jean Paul Riopelle
et de la Fondation du Musée d'art Audain.
Vous pourrez admirer ces chefs-d’œuvre dès le 24 février 2022, au coeur de l'exposition Les Énergies latentes. Paul-Émile Borduas au présent. La donation de Michael J. Audain et de Yoshiko Karasawa.
Pourquoi ces huit Borduas sont-ils si importants?
Les tableaux de Borduas de la généreuse donation Audain et Karasawa:
- Grenouille sur fond bleu (1944) est l’une des rares œuvres produites par Borduas à l’hiver 1944, alors qu’il travaille dans l’atelier d’Ozias Leduc à Saint-Hilaire.
- Arabesque (1955) aurait été produite dans les derniers temps du séjour new-yorkais de Borduas vers la fin de sa vie et porte les marques de l’influence de l’expressionnisme abstrait américain.
- Graphisme (1955) serait l’une des dernières peintures produites par Borduas cette année-là, alors qu’il arrive tout juste à Paris et manifeste les influences combinées de Jackson Pollock et de Georges Mathieu.
- Modulation aux points noirs (1955) appartient à une production de Borduas dans les semaines suivant son arrivée à Paris en 1955. Ce dernier semble avoir entamé, dans ce tableau son « bond simplificateur » qui le mènera aux grandes compositions en noir et blanc de l’année suivante.
- Figures schématiques (1956), probablement peint en août, est l’un des plus grands formats produits par Borduas dans sa carrière. L’œuvre deviendra une des icônes de la production parisienne de l’artiste.
- Chatterie (1957), produite dans une phase de travail particulièrement fertile pour Borduas, est décrite par François-Marc Gagnon – historien et critique d'art, écrivain et professeur – comme « une tentative de suggérer le mouvement et le rythme dans l'espace ».
- Sans titre (1957) montre une tendance à la structuration très contrôlée de la surface picturale, éloignant Borduas de sa période new-yorkaise et des influences de la peinture gestuelle (action painting), tout autant que de sa période automatiste. Cette phase structuraliste de Borduas correspond à un dialogue avec l’œuvre de l’artiste néerlandais Piet Mondrian, un des fondateurs de la peinture abstraite.
- Sans titre (1959) semble avoir été exécuté d’un coup, sans préparation, mais le geste puissant que représente ce tableau n’est qu’une illusion. L’œuvre est produite dans une période très prolifique qui voit naître plusieurs œuvres à la fois gestuelles et calligraphiques dont le MNBAQ ne conservait aucun exemple.
Un enrichissement majeur pour la collection nationale du MNBAQ
La collection nationale du MNABQ ne comptait, jusqu’à tout récemment, que 21 œuvres de Paul-Émile Borduas, l’un des artistes ayant eu le plus d’impact sur le développement de l’art moderne au Québec, voire au Canada. Dans ce contexte, la donation de M. Michael Audain et de Mme Yoshiko Karasawa permettra d'enrichir la collection et de combler des lacunes, favorisant l’intégration de l’artiste dans les expositions consacrées aux collections du Musée, et contribuant encore davantage à faire connaître l’œuvre et la pensée de Borduas depuis la première exposition collective que le Musée lui a consacrée en 1949.
Paul-Émile Borduas, Sans titre, 1957. Huile sur toile, 73 x 60 cm. Collection du Musée national des beaux-arts du Québec, Don de Michael Audain et Yoshiko Karasawa (2021.186) Photo : © MNBAQ, Denis Legendre
LES ÉNERGIES LATENTES OU LA PUISSANCE DE L’ŒUVRE DE BORDUAS EN ÉCHO À CELLES DES ARTISTES D’AUJOURD’HUI
Que vous réserve l’exposition Les Énergies latentes. Paul-Émile Borduas au présent. La donation de Michael J. Audain et de Yoshiko Karasawa? Elle s’articule évidemment autour de la donation exceptionnelle des tableaux de Paul-Émile Borduas au MNBAQ, mais elle présente également des œuvres de Nadia Myre, Michaëlle Sergile, Michel Campeau, Alain Paiement, Jean Paul Riopelle et Dominique Blain.
Le titre Les Énergies latentes fait référence aux énergies qui existent, sans être apparentes, à ces changements d’état de la matière et aux polarités multiples qui s’expriment dans la création et la pensée de Paul Émile Borduas. Les Énergies latentes couvent tour à tour dans la matière, dans le corps et dans l’esprit, entre le Soi et l’Autre, dans la lumière et dans l’ombre, dans le temps et dans l’espace, dans le trauma et dans la résilience, autant de polarités qui témoignent de la complexité de la nature humaine.
De Borduas à aujourd’hui, plusieurs artistes ont ancré leurs recherches esthétiques dans un territoire et une géographie, qui recèlent de ces forces incomparables, autant que dans les liens affectifs, identitaires et politiques qui façonnent l’humain et son expérience au monde. Les œuvres de la donation seront donc en dialogue avec plusieurs acquisitions récentes de la collection nationale du MNBAQ, car la production de Borduas continue de nous questionner sur l’existence, la création, l’engagement et la diversité.
2 Commentaires
Bravo! Un apport déterminant dans l'histoire de la collection du MNBAQ. Témoignant éloquemment de l'aboutissement de la pratique de Borduas, ce. corpus, tout en comblant des lacunes importantes dans la représentation du travail de l'artiste, renforce le rôle de pointe que doit jouer le MNBAQ pour une meilleure reconnaissance des grands enjeux de notre histoire de l'art contemporain.
Michel MartinQuelle merveilleuse année pour MNBAQ. La l'Espace Rioppelle et maintenant les oeuvres de Borduas. Cette nouvelle présence est digne d'un grand musée dans la capitale du Québec. Bravo et merci aux donateurs qui ont compris l'importance de ces nouvelles acquisitions pour le Québec.
jean-jacques Thibault