Petite histoire (de l'art) par Daniel Drouin, conservateur de l'art ancien (avant 1900) au MNBAQ
27 octobre 2020

Entreprendre un redéploiement de collection demande énormément de temps et de préparation et monopolise de nombreuses équipes sur plusieurs années. Ce type de réinstallation est l’occasion de montrer des œuvres jamais vues du public, de rendre accessibles de nouvelles recherches, de présenter sous un jour nouveau et à travers de nouveaux angles d’interprétation les œuvres qui forment le noyau fort de la collection.

En 2011, alors que les salles d’art ancien et moderne du pavillon Gérard-Morisset amorçaient leur onzième année, les équipes de la conservation entamaient déjà la création de nouveaux scénarios de redéploiement.

Mes premiers coups de cœur de l’actuelle salle Croire sont les deux grands tableaux peints en 1794 et vers 1819 par François Malepart de Beaucourt et Louis Dulongpré pour l’église de Saint-Martin de Laval. Durant des années, ils étaient soigneusement empilés à plat en réserve sur une immense tablette, avec sept autres toiles de Saint-Martin d’aussi grand format. Je ne connaissais leur iconographie qu’à travers des photographies prises au début des années 2000 alors qu’à l’époque, une équipe de manutentionnaires avait été réquisitionnée pour la manipulation de ces grandes pièces fragiles et très endommagées, démontées de leur châssis.

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Restaurés en 2017-2018 en marge du redéploiement des collections historiques par nos collègues du Centre de conservation du Québec, les deux tableaux ont retrouvé leur splendeur d’antan et font notre fierté. Il s’agit des seuls tableaux religieux de grande dimension de Beaucourt et de Dulongpré à figurer dans un musée canadien.

La présence au cœur même de cette salle du maître-autel de l’ancienne église de Sainte‑Anne‑de‑Beaupré relève de l’exploit. Cette remarquable pièce de mobilier liturgique, agrandie au fil du temps afin de s’insérer dans un retable de plus en plus volumineux, constitue à elle seule une synthèse du savoir-faire de plusieurs générations de sculpteurs qui ont marqué l’art de la Nouvelle-France, du Québec et du Canada.

Jacques Leblond de Latour a conçu à la fin du 17e siècle un meuble grandiose qui brillait de mille feux dans la première église de Sainte‑Anne-de-Beaupré. Juste avant la prise de Québec en 1759, ce sont deux représentants de la dynastie des Levasseur, François-Noël et Jean-Baptiste-Antoine, qui sont intervenus à leur tour afin d’en modifier l’apparence.

De Leblond de Latour et des Levasseur, le grand Thomas Baillairgé, fils de François, va conserver le dôme et le gradin de style rocaille dans un meuble entièrement redessiné par lui à la fin des années 1820 dans le plus pur style néoclassique. On lui doit également le splendide haut-relief doré et argenturé de La Cène du non moins magnifique tombeau d’autel et on comprend facilement pourquoi l’ensemble a été si jalousement conservé, telle une relique, par ses dépositaires.

Mon dernier coup de cœur va aux communautés religieuses et aux paroisses qui ont accepté de se séparer de leurs œuvres d’art au profit des visiteurs du Musée national des beaux-arts du Québec et, ainsi, contribuer à faire de cette salle un exceptionnel parcours de l’art religieux du Québec, du 17e siècle jusqu’au début du 19e siècle.

Mes remerciements les plus sincères vont aux Rédemptoristes de Sainte-Anne-de-Beaupré, aux Ursulines de Québec, aux Augustines de l’Hôpital général de Québec, à la fabrique Saint-Roch de Québec et au Musée huron-wendat de Wendake.


Légendes des figures

Photo 1 :
François Malepart de Beaucourt
(La Prairie, 1740 - Montréal, 1794),
d'après un peintre européen non identifié
La Résurrection d'un mort par saint Antoine de Padoue afin d'innocenter ses parents
1794
Huile sur toile
322 x 225 cm
Musée national des beaux-arts du Québec, achat. Restauration effectuée par le Centre de conservation du Québec (1970.68)

Photo 2 :
Louis Dulongpré
(Saint-Denis (France), 1754 - Saint-Hyacinthe, 1843),
d'après Eustache Le Sueur
(Paris (France), 1617 – Paris (France), 1655)
La Messe de saint Martin
1819 ou avant
Huile sur toile
317 x 223 cm
Musée national des beaux-arts du Québec, achat. Restauration effectuée par le Centre de conservation du Québec (1970.72)

2 Commentaires

Cette salle est magnifique et j’espère la revoir très bientôt. Il y a si je me souviens bien une pièce qui vient de l’église de St-Grégoire (maintenant dans la Ville de Bécancour).

Nicole Demers

Bonjour, Je suis très intéressée par les peinture sur cuivre du 17e siècle. J'aimerais beaucoup obtenir plus de renseigements à ce sujet. Est-ce possible pour vous de me contacter? Je vous en serais très reconnaissante. Merci beaucoup. Josée Trudelle

Josée trudelle

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