En coulisse par Bernard Lamarche, responsable du développement des collections et conservateur de l’art actuel (2000 à ce jour)
17 mai 2021

Quelle surprise que la mienne lorsque j’ai eu l’occasion de voir, à l’été 2019, les œuvres de Diane Obomsawin à Expression, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe. J’avais bien sûr pu suivre les pas de cette de cette artiste d’origine abénakise dans la sphère des arts visuels, elle qui était plus volontiers connue comme bédéiste sous le nom de plume Obom, auteure du très remarqué J’aime les filles (2014). Également établie en tant que cinéaste indépendante ou associée à l’ONF, Obomsawin avait notamment participé à la Manif d’art 6, Machines - Les formes du mouvement en 2012 à Québec.

Or, la visite de cette exposition, fort à propos intitulée Les mondes, a eu l’effet, pour le dire ainsi, d’une sorte d’épiphanie. Un peu plus d’une année plus tard, l’œuvre Les Étoiles, validée par les comités interne et externe d’acquisition, entrait dans la collection du MNBAQ.

Les Étoiles est une projection vidéo de grand format, réalisée en animation, mais dont la taille la rapproche de l’installation. Sur une boucle de 3 minutes 20 secondes, elle montre la création amusée d’une pléiade en forme de grenouille par des astres volontaires, puis raconte ses péripéties dans le cosmos. L’œuvre réinvente en quelque sorte la nuit des temps et propose un cycle dans lequel un cosmonaute vient faire sa ronde, arrivant des profondeurs de l’espace pour mieux repartir, ravalé par le vide.

Entre récit mythologique et science, Les Étoiles témoigne d’un temps long, comme le souligne la commissaire Nicole Gingras dans l’opuscule de l’exposition Les Mondes : « Regarder le ciel la nuit et découvrir la naissance d’une constellation, fruit d’une collaboration entre plusieurs étoiles et sur plusieurs millénaires. Une histoire d’amitié, de solidarité et de patience, où l’infiniment petit rencontre l’infiniment grand. »

Retrouvailles entre des conceptions hétérogènes du monde qui gagneraient à être plus souvent conjuguées, cette œuvre croise différents modes d’expression plastiques. Projection surdimensionnée à l’échelle d’une installation pour créer son plus bel effet, l’œuvre est à la jonction de l’illustration, du film d’animation et de la peinture panoramique. Son format géant résonne avec l’immensité du récit qui s’y trame.

Or, les moyens déployés pour faire naître ces images, tout aussi sophistiqués soient-ils, proviennent d’un art jugé à tort comme mineur, le dessin animé. La vidéo a été produite à la main, sur une tablette graphique numérique, à l’aide du logiciel TV Paint. Chaque tracé contribue à fabriquer le récit diffusé par trois projecteurs.

La fable que Les Étoiles transmet est majestueuse, on y fréquente le mythe candide de la création d’un ciel imaginaire, voire d’un cosmos entier. Avec ce récit d’étoiles qui se réunissent pour former une constellation en mouvement, sous la forme d’une grenouille qui traverse l'univers, l’œuvre présente une chronique de l’espace plein de l’humour reconnu de l’artiste, en plus de proposer une métaphore poétique de la conception du monde, de sa transformation et de son évolution, replaçant l’humain dans un rôle d’une relative humilité.

Une vidéo montrant un aperçu de l'oeuvre, sans l'effet panoramique, est disponible ici.

3 Commentaires

C'est beau et poétique.

Beaudry

Je ne parviens pas à démarrer la vidéo.. Desolée.

MarieBeique

Video non disponible !

nicole stein

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